– Les créateurs –

Robert Pujol

L’outil est le prolongement de la main de l’homme, de son intelligence, de son savoir. En recyclant les ferrailles abandonnées ou destinées à la fonderie, j’en fais la matière première de mes créations.

Sculpteur paysan autodidacte, ancien berger, plus habitué à faire qu’à dire, j’ai appris à observer et à communier avec cette nature. Comme ces insectes, sculptés dans le métal, qui entrent pleinement en relation avec le centenaire de la naissance du naturaliste Jean-Henri Fabre. Mes créations lui rendent hommage. Ma sculpture raconte une histoire, une terre, des hommes, ancrée dans la ruralité d’un patrimoine témoin d’un humanisme qui s’estompe aujourd’hui.

Ces outils usés par l’homme sont les meilleurs matériaux pour exprimer ma pensée : tordre, assembler, souder, poncer jusqu’à l’adéquation entre la matière et l’inspiration du moment. J’invite parfois la pierre de grès locale à côtoyer le métal poli. C’est  un beau voyage dans le temps, empreint d’émotion, un intervalle de partage et de transmission.

(Chaque outil que je façone et transforme raconte un moment de ma vie passée sur le Causse. J’ai vu travailler ces machines attelées à des bœufs ou des chevaux, j’ai joué dans mon enfance avec les outils de jardin ou de travail du bois. L’ancrage de ces formes dans ma mémoire est étroitement lié aux hommes et aux femmes qui les manipulaient. Le paysan ou l’artisan fabriquait et adaptait son outil à son labeur, à la terre ou à la matière qu’il travaillait. Je respecte profondément ce savoir-faire qui a bercé mon enfance, c’était aussi un savoir être face à une nature parfois hostile que l’on aimait et qui nous nourrissait).

Dans un monde où tout semble acquis, où les courants artistiques ne sont reconnus que par quelques initiés, ma sculpture s’inscrit humblement dans une recherche de paix avec soi, elle devient une thérapie personnelle face aux questionnements sur notre condition humaine.

L’art doit susciter l’émotion, inviter au rêve et au questionnement, partager nos mémoires et tenter de laisser une empreinte même fugace dans le regard de l’autre.  R.P.